run boy run (jappy)

jappy

T'es tellement occupé à t'imaginer comment tu vas convaincre Poppy, collée à toi sur ta bécane, de te faire monter chez elle que t'en oublies presque le danger. Parce que clairement, c'est pas sans arrière pensée que t'as généreusement proposé de la conduire à allston après les cours. Mais t'es ramené à la réalité de la pire façon qui soit, tes doigts faisant soudainement basculer la visière ouverte de ton casque devant ton visage. Deux types vous attendent au bout de la rue, glissés dans un uniforme de flic qui aurait pu motiver un sifflet bruyant de ta part dans d'autres circonstances. Tu veux dire par là, si tu ne trimbalais pas derrière toi une meuf avec un sac à dos rempli de drogue. Enfin t'imagines que c'est ce qu'il contient, parce qu'en vérité t'as aucune foutue idée des produits que tu transportes pour les mafieux du coin. Mais même sur un malentendu, t'es à peu près convaincu qu'on ne te charge pas de la livraison d'un lot de pelotes de laine à tricoter. C'est emballé dans un paquet tellement serré que même toi, fouine internationale, t'as pas osé y toucher. Et puis t'as pensé que moins t'y touchais, moins tu deviendrais coupable. Sauf que ça te percute là tout de suite, que c'est pas le genre d'argument qui fera fureur devant le juge "non mais attendez, j'y ai même pas touché monsieur le président !" Oh bon alors, si t'y as pas touché ...  Fuck. Fuck. Fuck. Tu décélères doucement, ton pied enclenchant la vitesse inférieure. CLIC. T'essaies de rester calme, mais t'as le palpitant au bord de la gorge, les muscles tendus et le souffle coupé. Si tu te fais pécho avec ce putain de sac à dos, t'es bon pour la taule. T'es persuadé que même papa n'y pourra rien cette fois, parce que là t'es clairement coupable. De tout. Avec une jolie preuve sur le dos de pop's, qui sommeille au fond du sac. Et faut le dire, t'es trop beau pour aller en taule. L'engin ralentit jusqu'à l'arrêt, ta jambe prenant appui sur le trottoir. T'espères juste que Poppy va pas se mettre à gueuler comme une truie qu'elle capte pas pourquoi tu bloques à trois rues de là où elle crèche. Toi tu dis rien, tu fais comme si t'avais prévu de t'arrêter quelques mètres avant le barrage de contrôle parce que y'a un magnifique parc dans lequel t'avais justement organisé une belle balade du soir avec ta meuf. Puis finalement, tu mets la béquille et tu te tournes à demi. « Ta gueule, ta gueule, descends. » T'anticipes et t'ordonnes avec ta bonté naturelle, juste au cas où elle était en train d'ouvrir sa bouche. En même temps tu peux pas trop articuler plus que ces gentilles paroles, t'as trop la boule au ventre. Tu quittes la scelle de ta bécane en conservant ton casque, et tu remarques que l'un des flics vous fixe avec une certaine insistance. Merde, il vous a grillé, c'est sûr. C'EST SUR. Tu sues comme un porc, les yeux dérivant vers Poppy et le sac que tu lui as confié avant de grimper sur ta moto. Elle a même pas posé de questions quand tu lui as demandé de le prendre sur son dos la pauvre brune, en même temps ça paraissait logique. Elle s'est pas doutée que tu la rendrais complice de tes combines. Et pendant que tu mates Pop's, tu vois les choses sous un regard nouveau. T'as acheté cette moto en cash la veille et t'as une immat' bidon. T'as ton casque sur la tête. Poppy a le sac sur son dos. Le flic commence à avancer. [...] Il te faut pas plus de dix secondes pour lui tourner le dos et commencer à marcher en direction de l'entrée de l'espace vert, discrétos. Comme le parfait petit lâche que tu es. Tu lui dis rien, juste tu te barres, tranquille. Et après quelques pas, quand t'es certain d'être hors de champ de vision des flics, tu te mets à détaler comme un lapin à l'intérieur du parc. De toute façon, son frère est l'un des leurs, il pourra sûrement la sortir de là. Alors que toi, t'as vraiment pas besoin de ça, déjà que t'es accusé de viol par une pétasse. Et puis, elle kiffe les séries policières et toutes ces conneries, pas vrai ? Là, elle sera en immersion. Mais putain, tu vas avoir un sale karma.